Les conditions d’études sont très souvent dégradées

Cet article est une sous-partie d’un grand dossier sur les études de jeu vidéo publié par le STJV. Vous retrouverez le sommaire de ce dossier, et les liens vers toutes ses parties, ici : https://www.stjv.fr/2021/09/dossier-sur-les-etudes-de-jeu-video/

Avertissement : Dans cet article nous abordons des situations d’abus, harcèlements, agressions, suicide, etc. qui peuvent être violentes à la lecture pour des personnes qui en ont été victimes.

Tout d’abord, et à l’image de l’industrie du jeu vidéo, les conditions d’études dans les écoles et formations de jeu vidéo sont mauvaises. Si elles varient d’une école, d’une formation et d’une année à une autre, elles en viennent à impacter chaque étudiant‧e au cours de sa scolarité.

Rien qu’au niveau matériel, le STJV a pu recenser de nombreux défauts : du matériel informatique et du mobilier de bureau obsolète ou cassé, parfois tout simplement non fourni, accentuant les différences entre élèves, les plus aisé‧es ayant accès à du matériel personnel leur permettant de travailler, tandis que les plus pauvres doivent se démener avec le peu qu’on met à leur disposition. Certaines écoles vont jusqu’à mentir lors des journées portes-ouvertes (JPO) : on nous a rapporté des cas d’écoles qui louent du matériel récent uniquement pour les JPO, dans le but d’impressionner parents et futur‧es élèves. Ailleurs, des infrastructures souffrant d’un taux d’humidité important, d’une mauvaise aération ou n’ayant carrément pas de chauffage nuisent directement à la santé des élèves.

Bien que cela semble commencer à être moins courant, de nombreuses écoles ne fournissent pas de licences pour les logiciels nécessaires aux cours. L’installation de logiciels crackés (piratés) sur les ordinateurs de l’école ou directement sur ceux des étudiant‧es est une pratique maintes fois abordée par les témoins. Comme dans ce témoignage d’un‧e ancien‧ne étudiant‧e d’ISART Digital :

« Un des passages obligatoires avant la rentrée scolaire consistait à apporter son PC personnel au service informatique de l’école, pour que celui-ci installe plusieurs versions crackées de logiciels -normalement payants- dessus. »

Comme rapporté en détails dans les premiers articles publiés chez Gamekult et Libération, la charge de travail est bien trop élevée dans les formations de jeu vidéo et d’animation, copiant ainsi les pires travers (le « crunch ») que l’on peut trouver dans l’industrie. Le manque de coordination pédagogique entraîne une accumulation de projets qui ne peuvent être réalisés et rendus dans des conditions normales et les dates de rendu choisies (juste après des weekends ou vacances) poussent au surtravail. Quand ce ne sont pas les directions pédagogiques elles-mêmes qui poussent les étudiant‧es à se tuer au travail : nous avons pu consulter de nombreux mails et messages envoyés à des élèves dans lesquels iels sont poussé‧es à travailler toujours plus, et où les nuits blanches de travail sont présentées comme la norme, ou même un idéal à atteindre.

Les attentes en terme de qualité et de quantité sont aussi bien trop élevées, et dépassent ce qu’il serait normal d’attendre d’étudiant‧es en plein apprentissage. Les écoles et professeur‧es les poussent autant que possible à « produire » des projets d’études qui prennent la forme de produits finis. L’aspect pédagogique des exercices passe complètement au second plan : ne compte plus que la marketabilité des projets (et donc du travail gratuit des étudiant·es), sans se soucier des conséquences sur les conditions d’études et de vie. Le surtravail est mauvais pour la santé, physique ET mentale, et est particulièrement dangereux à un âge de construction sociale et intellectuelle.

Sur le plan de la sociabilisation durant les études, les mêmes gros points noirs ont été retrouvés dans chacune des formations pour lesquelles nous avons reçu des témoignages. Sexisme, racisme, homophobie, transphobie et toutes autres sortes de discriminations basées sur l’identité, la culture, le lieu de vie, le handicap, la santé, etc. des étudiant‧es sont présentes partout, à divers degrés. Sous couverts de « blagues » s’installe de manière récurrente une atmosphère rappelant à toute personne sortant de la norme de l’industrie qu’elle n’est pas la bienvenue. Et cela va parfois jusqu’à des discriminations sur les notes et les passages en année supérieure. Les faits de harcèlement, commis par des élèves, professeur‧es, intervenant‧es et/ou les directions, ne sont pas rares et poussent chaque années des étudiant‧es à abandonner leurs études, dans la dépression ou, dans des cas plus rares et plus extrêmes, au suicide. Les deuxièmes articles publiés par Libération et Gamekult abordent le cas du sexisme de manière plus approfondie.

Ces exactions sont notamment rendues possibles par l’absence, bien trop courante, de suivi des étudiant‧es. Le manque de temps et de moyens alloués au corps professoral en est en partie responsable, et cette situation est causée par l’inaction de directions qui considèrent tout ce suivi comme « annexe », niant que la vie étudiante fait partie intégrante des cycles d’études. Des écoles vont jusqu’à considérer que tout ce qui se passe en dehors des rendus de projets et notes ne les concernent pas : cela a parfois déjà été dit explicitement à des professeur·es et étudiant·es. Cela leur permet de balayer la réalité et la responsabilité directe des écoles dans la vie des étudiant·es, que ce soit leurs besoins personnels (handicap, situation sociale, santé, précarité financière, et.) et leurs relations avec les autres étudiant·es (sur les réseaux sociaux, entre les cours, dans des soirées et événements, …). Les conséquences de cette déresponsabilisation sont terribles, menant des étudiant·es au suicide quand la direction de leurs écoles ignore délibérément les signalements répétés de campagnes de harcèlement ou d’agressions.

Dossier sur les études de jeu vidéo

Avertissement : Au fil des articles présentés ici nous abordons des situations d’abus, harcèlements, agressions, suicide, etc. qui peuvent être violentes à la lecture pour des personnes qui en ont été victimes.

Les expériences de nos camarades du STJV, les témoignages et retours que le syndicat a eu directement, par les réseaux d’ancienn‧es élèves et des collègues professeur‧es, rendent évident le constat suivant : la filière d’enseignement du jeu vidéo est, dans son ensemble et de manière systémique, nocive et détruit des vies.

Un appel à témoignage public sur les conditions d’études lancé par le STJV début 2020 a permis de constater que le problème est bien plus répandu et surtout bien plus grave que ce que nous pensions à l’origine. Nous avons recueilli à date de publication une soixantaine de témoignages concernant plus de 30 écoles et formations, avec parmi elles les écoles les plus connues en France.

Le suicide d’un étudiant à LISAA en Décembre 2020, suivi d’une répression interne par l’école pour étouffer l’événement, nous avait poussé à accélérer nos efforts d’information sur cette situation, et notamment à contacter des journalistes pour les alerter sur ces questions. Grâce à notre contact et en se basant d’abord sur le corpus de témoignages à notre disposition, ils ont pu lancer leurs propres enquêtes pour confirmer nos informations puis publier des séries d’articles sur les écoles de jeu vidéo dans Libération et Gamekult (liens à la fin du communiqué) mi-Avril 2021.

L’aspect cool de la production de jeux vidéo, que les entreprises de l’industrie utilisent déjà pour garder les salaires et conditions de travail mauvaises, est aussi exploité par les écoles qui en profitent pour attirer toujours plus de jeunes prêt‧es à payer des sommes astronomiques pour essayer d’en faire leur métier.

Comme partout ailleurs, comme dans le reste de l’industrie du jeu vidéo, les mécanismes de domination économiques, hiérarchiques, sexistes, racistes, validistes, ainsi que la répression active des directions d’écoles tendent à empêcher toute amélioration de la situation et à réduire (au moins en apparence) les capacités d’actions des personnes qui souhaitent cette amélioration.

Ces mécanismes créent et accroissent les inégalités et discriminations dans l’industrie, et ce dès l’entrée des écoles avec sélections discriminatoires et prix exorbitants, qui ne font que s’accentuer au cours des études avec tous les leviers possibles : quasi-impossibilité d’avoir un job à côté des cours avec la charge de travail, rareté et mauvaise gestion des parcours en alternance, accès à du matériel très inégal, pression pour faire des stages dans n’importe quelle ville, non-rémunérés, etc. Les problèmes de diversité de l’industrie du jeu vidéo commencent dès les études.

La grande majorité des problèmes que nous avons constaté ont pour cause la marchandisation de l’enseignement et des étudiant‧es. Les écoles privées restent avant tout des entreprises : elles sont donc soumises à des impératifs de rentabilité. Cette rentabilité a plus ou moins d’importance selon qui possède l’école, avec dans les pires des cas des groupes ou fonds d’investissement qui ne traitent les écoles que comme des vaches à lait dont la rentabilité doit toujours augmenter au détriment des travailleur‧ses et étudiant‧es. Même les directions les mieux intentionnées (quand elles le sont !) ne peuvent échapper à cette réalité imposée par l’organisation capitaliste de l’économie.

Après près de 2 ans de travail au sein du STJV, nous revenons dans ce dossier fleuve sur les problèmes constatés dans les écoles de jeu vidéo, les choses auxquelles faire attention quand on veut étudier le jeu vidéo, et sur ce que nous pouvons faire et réclamer pour empêcher que des générations entières de personnes intéressées par notre industrie continuent à être saignées à blanc chaque année. Nous ne parlerons ici que du jeu vidéo car c’est notre secteur et que c’est là que nous avons le plus d’informations mais, à de rares exceptions près, tout cela s’applique pour l’ensemble de l’enseignement supérieur privé.

La taille de ce dossier nous oblige à le publier de manière fractionnée. Nous en publierons régulièrement les sous-parties, qui seront accessibles par les liens ci-dessous.

Partie 1 – État des lieux

  1. Les conditions d’études sont très souvent dégradées
  2. Les étudiant‧es sont exploité‧es au profit de l’image des écoles
  3. La qualité d’enseignement reste très discutable
  4. Les écoles ne préparent pas du tout à l’entrée sur le marché du travail
  5. Ces conditions assurent la reproduction des problèmes de l’industrie
  6. Les écoles se mettent au service de l’industrie, et non des étudiant‧es

Suites à tout nos échanges avec des professeur·es et étudiant·es, et aux témoignages que nous avons reçus, nous avons réalisé que ces problèmes n’étaient pas juste courants, mais systématiques. Si en commençant nos enquêtes nous pensions que moins une école était connue, plus elle se permettait des abus, il a fallu nous rendre à l’évidence : toutes les écoles et formations sont concernées.

Il nous est impossible, à ce jour, de citer une formation ou école privée qui n’a pas eu de graves dysfonctionnements ces dernières années. Point particulièrement glaçant : nous avons eu vent de situations de harcèlement ou carrément d’agressions sexuelles visant des étudiantes dans toutes les écoles et formations pour lesquelles nous avons recueilli des témoignages.

Si on peut dire que les formations privées semblent globalement plus concernées que les formations publiques, cela ne veut surtout pas dire que le public est épargné pour autant. Certaines formations publiques moins connues sont organisées comme le privé et, s’ils peuvent être différents, les enjeux de pouvoir problématiques existent partout, même dans les écoles publiques les plus prestigieuses.

Dans la plupart des cas ces problèmes émergent et persistent à cause de l’inaction des directions des écoles et/ou des groupes financiers qui les possèdent. Celles-ci refusent de se donner les moyens de protéger les étudiant·es par népotisme, opportunisme, soucis d’économie, manque d’empathie, ou aveuglement par rapport à la situation de leurs étudiant·es.

Partie 2 – Quels chemins prendre ?

On retrouve ainsi dans les études de jeu vidéo les problèmes et discriminations présents au niveau de la société toute entière, concentrés dans une série d’entre-sois formant une omerta, où toute expression de victimes et tentatives de lutte est durement réprimée. Si les milieux étudiant‧es y sont si propices, ce n’est pas qu’à cause de ses spécificités. Les causes de ces terribles situations ont les mêmes racines que celles que l’on retrouve dans le milieu du travail en général.

Elles sont d’abord économiques : les motivations financières des entreprises, auxquelles il est impossible d’échapper dans un système économique capitaliste, font passer la rentabilité de celles-ci avant les conditions de vie des étudiant‧es. Ce problème est renforcé depuis quelques années par un phénomène de création de monopoles dans l’enseignement supérieur privé, des groupes d’investissement de plus en plus gros absorbant les écoles indépendantes et plus petits groupes. Ce phénomène touche aussi, non sans coïncidence, le jeu vidéo et de nombreuses autres industries.

Ces motivations économiques impactent directement la dimension sociale de ces formations, où querelles de pouvoir et maintien par la force des rapports hiérarchiques sont plus que courant. Une véritable domination économique s’exerce sur les professeur‧es et les étudiant‧es.

Les problèmes décrits dans la première partie et leurs causes sont connues des organisations de travailleur‧ses et étudiant‧es, qui luttent contre depuis des siècles, mais aussi des entreprises elles-mêmes, qui savent les cacher ou les exploiter quand cela est à leur avantage, même si certaines semblent depuis peu chercher à y apporter de réelles solutions.

La fréquence et la gravité des problèmes rencontrés localement dépend d’un ensemble de facteurs, et les réactions des écoles varient grandement. Certaines d’entre-elles n’ont pas du tout pour but d’aider les élèves, et d’autres, bien intentionnées et parfois même bien conçues, ratent complètement leurs objectifs, mobilisent des moyens conséquents qui seraient bien mieux utilisés ailleurs, ou ont des effets secondaires néfastes.

Nous allons maintenant étudier les solutions proposées par ces différents acteurs, discuter de leur pertinence, exposer celles qui nous semblent les plus appropriées, et nous pencher sur ce que nous pouvons faire et réclamer pour empêcher que des générations entières de personnes intéressées par notre industrie continuent à être saignées à blanc chaque année.

  1. Beaucoup de solutions proposées sont des impasses ou des mensonges
  2. Pour avancer, des changements doivent avoir lieu à tous les niveaux
    1. Au niveau du contenu pédagogique
    2. à venir
    3. à venir
    4. à venir

Le dossier sera disponible aux format .pdf et .epub une fois publié en entier.

Les articles de Libération et Gamekult dont nous parlions en introduction sont disponibles ici :

Mesures sanitaires : nous protéger collectivement, en dépit du gouvernement

D’autres que nous ont très bien exposé les problèmes de fond posés par la mise en place du « pass sanitaire » par le gouvernement : voir notamment cette tribune, ou les communiqués de la CGT, de l’Union Solidaires et de l’Union Communiste Libertaire. Au-delà des mesures elles-mêmes, il y a une méthode de gouvernance inacceptable qui consiste à annoncer sans débat, à faire voter sans négociation et à imposer sans justification, détruisant un des fondements d’une démocratie : la séparation des pouvoirs.

Ses justifications, le gouvernement ferait bien de les revoir car, derrière ses discours rassurants sur la situation sanitaire, il y a de réels problèmes voire des incohérences profondes. Son empressement à revenir « à la normale », mû comme souvent par des volontés électoralistes, l’amène à mentir pour laisser entendre que la vaccination est une sorte de baguette magique mettant fin à l’épidémie pour les personnes vaccinées.

Si les bénéfices (réduction significative des risques pour soi et pour les autres, et à terme participation à l’éradication du virus) de la vaccination sont immenses et incontestables, elle ne protège pas à 100% et n’empêche pas complètement de se contaminer ou de contaminer les autres. Le vaccin n’est donc pas une solution individuelle mais collective.

C’est pourquoi il est important que le plus grand nombre d’entre nous se fasse vacciner, non pas pour suivre le gouvernement dans son idéologie individualiste mais pour notre santé à toutes et à tous. La campagne du gouvernement est tissée de mensonges et favorise de manière disproportionnée les populations aisées, comme toutes ses politiques. Agissons de manière autonome pour construire une couverture vaccinale capable de protéger tou‧tes les travailleur‧ses !

N’oublions pas non plus que derrière cette gestion calamiteuse de la pandémie et de la campagne de vaccination, le gouvernement a la volonté de relancer des réformes tout aussi néfastes pour les travailleuses et travailleurs, en particulier sur la gestion du chômage et les retraites. Il est hors de question qu’après avoir fait moins que le strict minimum dans la gestion de la pandémie, Emmanuel Macron se pique d’imposer ces réformes injustes, injustifiées et rejetées en masse.

Devant l’absence de clarté du gouvernement qui, par exemple, a annoncé en grande pompe la possibilité de licencier un salarié sans pass sanitaire alors que celle-ci a bien heureusement été retirée de la loi votée, le STJV continuera d’aider et de protéger les travailleuses et travailleurs qui en ont besoin. Dans le contexte actuel, cela implique de rappeler les faits suivants (en complément de ce que nous rappelions déjà au début de l’été) :

  • Le télétravail reste une solution pratique, efficace et éprouvée par plus d’un an de crise sanitaire. Les métiers du jeu vidéo, dans leur ensemble, y sont très propices. Les entreprises du milieu du jeu vidéo doivent continuer à y recourir jusqu’à ce que la situation sanitaire permette réellement de relâcher les mesures prises.
  • L’application des mesures sanitaires (désinfection et aération des locaux, distanciation physique, protection par le port du masque durant toute la journée de travail) est indispensable et obligatoire si la présence physique au bureau est nécessaire. Le renouvellement minimal de l’air peut aussi être contrôlé (capteurs de CO2) et dans les lieux peu ou pas aérés, des dispositifs de filtration de l’air (norme HEPA) peuvent être installés et régulièrement changés pour diminuer les risques.
  • La possibilité de suspendre le salaire pour absence de pass sanitaire pour les personnes travaillant dans un endroit où il est requis (et donc PAS dans les entreprises produisant des jeu vidéo !) est une aberration, d’autant plus que le rythme de vaccination actuel ne permet pas à toutes et tous d’être vacciné au jour d’entrée en vigueur du pass sanitaire. Nous nous opposerons fermement à tout patron qui utiliserait cette mesure, d’autant plus quand d’autres solutions existent. La suspension de salaire est une sanction brutale et inacceptable, et est tout simplement à proscrire.
  • Le parlement a enfin entériné, dans l’article 17 du texte voté, l’autorisation pour les salariés d’aller se faire vacciner sur les horaires de travail, sans diminution du salaire ou des droits aux congés. Il n’y a donc plus aucune excuse possible à ce niveau, et nous serons intraitables face à toute entreprise qui s’opposerait à l’exercice de ce droit.

Quoi qu’il en soit, le STJV continuera de surveiller l’application des mesures gouvernementales et l’attitude générale des entreprises du secteur. Nous restons toujours à la disposition de celles et ceux qui auraient besoin de notre aide, ou auraient des questions sur leur situation ou celle de leur entreprise. N’hésitez jamais à nous contacter à

Manifestons par milliers pour l’interdiction des licenciements, contre les suppressions d’emplois et la réforme de l’assurance chômage !

Nous reproduisons ici le communiqué de la coordination nationale contres les suppressions d’emploi à l’appel des TUI, dont le STJV est signataire. Notre syndicat sera présent à la manifestation du 19 Juin.

Le 23 janvier dernier, plusieurs milliers de manifestant‧e‧s, syndicalistes, militant‧e‧s, travailleuses et travailleurs du public et du privé, licencié‧e‧s, jeté‧e‧s comme des malpropres à la porte des entreprises, défilaient à l’appel des TUI dans les rues de Paris de l’Assemblée Nationale au Medef.

Plus d’un an après le début de la pandémie et 100 000 morts plus tard, le maintien à tout crin des profits des actionnaires sème sur son chemin des milliers de salarié‧e‧s sans-emploi.

Les aides publiques par milliards remplissent les caisses des patrons du CAC 40, les engraissent jusqu’à faire exploser les chiffres des profits. Ils s’appuient sur la crise sanitaire pour licencier et continuer à se goinfrer même si cela veut dire que nous toutes et tous, quelque soit notre secteur professionnel, soyons viré‧e‧s par charrettes et emplissions la file déjà immense des privé‧e‧s d’emplois.

Début avril 2021, le Ministère du travail recense 928 plans de licenciements PSE cumulés entre le1er mars 2020 au 21 mars 2021. Cela représente plus de 105000 ruptures de contrats envisagées dans ce cadre, auxquelles s’ajoutent les 7375 licenciements dans le cadre de procédures concernant moins de 10 salariés.

13 nouveaux plans de licenciements sont toujours annoncés chaque semaine.

Alors que les plans de licenciements se multiplient depuis plus d’un an, le gouvernement ne trouve rien de mieux à faire qu’une réforme de l’assurance chômage, qui va accroître la misère de centaines de milliers de privés d’emploi. Le cynisme de nos dirigeants n’a d’égal que la soif de profits. Ce carnage concerne l’ensemble du monde du travail.

Dans les services publics, c’est par milliers que les postes ont été supprimés dans les services postaux, l’éducation nationale, la justice, l’inspection du travail…Dans la Santé, la CGT estime qu’il manque 100 000 emplois dans l’hôpital public et 200 000 dans les Ehpad pour assurer un service public de qualité.

On ne va pas se laisser faire !

Chaque jour, des équipes se battent pour sauver leurs emplois, se démènent contre la répression patronale ou d’État qui s’abat sur elles, sur celles et ceux qui résistent.C’est avec les dents que nous devrons arracher des victoires et nous ne pourrons pas gagner en restant isolé‧e‧s, séparé‧e‧s, divisé‧e‧s.

Pourquoi construire le 19 juin? Ce ne sera pas la date d’un secteur seul, isolé confronté aux licenciements et aux suppressions d’emplois, mais l’occasion de sortir du boîte par boîte et de se donner les moyens de frapper ensemble! De dire ensemble notre opposition aux licenciements et aux suppressions d’emplois et à la réforme de l’assurance chômage.

Mais surtout le 19 juin est issue d’un cadre inédit, initié par «l’appel des TUI», un cadre qui regroupe à la fois des secteurs, des syndicats et des organisations politiques différentes. Des organisations différentes, mais qui sont prêtes à dépasser leurs divergences, leurs «structures» pour faire bloc pour ne pas payer cette crise, car elles savent que c’est dans la rue que ça se gagne!Toutes et tous ensemble!

Faisons du 19 juin, une étape massive, visible, revendicative, collective dans laquelle chacune et chacun se sente la responsabilité de la construire et de la populariser.

Ce n’est pas à nous, de payer leur crise !

C’est à nous en revanche de tout faire pour nous regrouper et frapper ensemble pour mettre un coup d’arrêt à ce jeu de massacre qui n’épargne aucun secteur du public comme du privé. Partout mobilisons-nous: organisons des départs collectifs, des réunions unitaires et montons sur Paris.

Condition des étudiant-es en animation : une tribune indigne pour LISAA

Il y a quelques mois, nous alertions sur le suicide d’un étudiant de la section Animation de L’Institut Supérieur d’Art Appliqué (LISAA). Pheanith Hannuna avait mis fin à ses jours suite à une campagne de harcèlement d’autres étudiant‧es de sa promotion. La direction de LISAA ne l’avait non seulement pas protégé, malgré les alertes de sa famille, mais avait même fini par laisser entendre, peu avant son passage à l’acte, qu’il était fautif de son propre harcèlement. Par la suite, l’école a renvoyé de manière irrégulière un‧e professeur‧e qui cherchait à trouver des solutions aux problèmes des élèves pour que ce genre de situation de se reproduise pas, et a même poussé la répression jusqu’à empêcher les étudiant‧es et professeur‧es de parler des articles sur l’école. Plus d’information dans notre communiqué d’alors.

C’est donc avec choc, et un très vif dégoût, que nous avons découvert que Catherine Constant-Grisolet, directrice des sections Animation et Jeux Vidéo de LISAA, et donc une des personnes qui était responsable d’assurer la sécurité de Pheanith, avait été choisie pour modérer une table-ronde sur « les efforts » du Réseau des Écoles du Cinéma d’Animation (RECA) pour lutter contre le mal-être étudiant dans le cadre du Marché International du Film d’Animation du festival d’Annecy. Cette directrice a été pointée du doigt dans plusieurs témoignages d’élèves et de professeur‧es de LISAA comme une des responsables des mauvaises conditions d’études dans cette école.

Son manque de considération pour les élèves fait peu de doute, comme on peut le constater dans des témoignages retranscrits par Gamekult dans son article Sexisme, harcèlement et « bro culture » au sein des écoles de jeu vidéo : « Moi, je me fais pas diriger par une fille » :

« On reçoit un communiqué abject de la directrice : il manquait d’empathie et était rédigé n’importe comment. (…) Après la gestion un peu maladroite de l’école à ce sujet, j’ai remarqué que nous n’avions reçu aucune consigne de la part de la direction pédagogique pour s’assurer du bien-être des élèves dans une telle situation et sur quoi leur dire, tout simplement. »

« Le responsable pédagogique a réuni toutes les classes de game avant de recevoir le communiqué officiel de l’école, le corps enseignant n’a pas été convié (…) Quand on l’a appris on était tous très choqués de ce qui s’est passé mais le pire, c’était la communication surréaliste de la directrice, on aurait cru à un live Twitch bon enfant avec des blagues. Elle a notamment imité le son du silencieux, comme dans le film « Les Tontons Flingueurs », en faisant référence au fait de se tirer une balle dans la tête. C’est à ce moment-là que plusieurs personnes sont parties, c’était irrespectueux au possible. Elle a même rigolé devant la caméra. »

L’article de Capital indique quant à lui le choix de LISAA de totalement ignorer la famille dans son deuil :

Aucun des deux responsables pédagogiques ne s’est manifesté auprès de la famille pour présenter ses condoléances.

Aucun représentant de LISAA n’était présent à l’enterrement.

La présence de Catherine Constant-Grisolet comme modératrice de cette table-ronde, conjuguée à la répression interne, et au silence de l’école suite à la sortie des articles et de notre communiqué, atteste de la volonté de LISAA d’étouffer le suicide d’un de ses étudiants, quand bien même il y ait 2 procédures judiciaires en cours (1 devant le conseil des prud’hommes, 1 au pénal).

Dans ce contexte, cette participation interroge sur la sincérité des efforts du RECA, qui n’était soit pas au courant de ce qu’il s’est passé à LISAA (ce qui serait assez inquiétant), soit l’était et a sciemment choisi d’ignorer cet état de fait pour se rendre complice de la direction de cette école.

S’il est plus que jamais important de parler des problèmes des conditions d’études dans l’animation, le jeu vidéo et au-delà, il est inacceptable que ces discussions soient menées par des personnes responsables de ces problèmes. Ce genre de discussion doit faire intervenir des étudiant·es actuel·les et passé·es, ce qui est le cas ici et nous le saluons, et des personnes les représentant et les défendant (syndicats, associations, etc.). Pas des directions d’écoles : on ne laisse pas le loup et l’agneau dans la même pièce.

Le STJV, qui travaille depuis Décembre avec différent·es acteurs et victimes de LISAA, dénonce la présence de Catherine Constant-Grisolet à cette table-ronde. Celle-ci est en effet une véritable claque renvoyée à la figure de tout‧es les étudiant‧es souffrant des conditions de leurs études et subissant l’inaction de leurs directions. Nous demandons aux organisateur·ices du festival d’Annecy de corriger ce que nous espérons être une erreur de bonne foi, pour le bien des étudiant·es en Animation du RECA.

Évaluations et rémunération à Ubisoft : Moins d’arbitraire, plus d’équité !

Ce communiqué a été écrit par des salarié‧es du groupe Ubisoft en France, incluant les sections STJV d’Ubisoft Annecy, Ubisoft Montpellier et Ubisoft Paris.

À nos camarades travailleurs et travailleuses d’Ubisoft,

Comme vous le savez sûrement, la période des évaluations et des augmentations vient de se dérouler, et avec elle son lot de remises en question. Parce que nous connaissons cette situation, les membres du STJV travaillant chez Ubisoft ont mis en commun leurs constats et réflexions, que nous souhaitons partager avec vous.

D’abord, quelques constats. La problématique de la rémunération est complexe, et il nous semble clair que la direction joue la carte de la dilution de la responsabilité. Le processus qui nous est présenté est que le siège négocie avec les entités du groupe un budget, qu’elles doivent ensuite attribuer aux projets et équipes internes. Les managers sont ensuite en charge de faire une répartition à leur niveau.

Ce processus fait que personne n’assume réellement les décisions : le siège peut expliquer que les entités n’ont pas bien négocié, les directions locales que le siège n’a pas attribué un budget suffisant, les responsables d’équipes que les services RH n’ont pas voulu faire d’effort… Au final, personne n’est responsable, le niveau de rémunération d’une personne lambda chez Ubisoft est présenté comme un état de fait.

Au-delà de ce tour de passe-passe, nous dénonçons le lien établi entre l’évaluation annuelle de la performance d’une personne et le montant de son augmentation. Cela peut sembler contre-intuitif : quelqu’un qui fournit un effort spécifique et s’améliore dans ses compétences professionnelles ne mériterait pas récompense ? Pourtant, nous considérons que cela pose deux problèmes majeurs :

  • Tout d’abord, cela ne suffit pas à régler les inégalités de rémunération qui existent au niveau du recrutement, inégalités créées par des discriminations, par des circonstances qui font que certaines entités peuvent se permettre de recruter à des salaires plus hauts que d’autres, ou par d’autres éléments qui n’ont pas lieu d’être.
    Les augmentations, proportionnelles au salaire, ne font qu’augmenter ces inégalités : nous souhaitons recentrer le débat sur la rémunération absolue.
  • De plus, la limite imposée des augmentations mène à une situation de jeu à somme nulle, où la personne responsable d’une équipe va devoir distribuer un nombre limité de « bons points », quitte à devoir trouver des justifications parfois bancales aux performances qui auront été sous-évaluées. Comme si une équipe ne pouvait pas, dans son ensemble, avoir réalisé une très bonne année.

Il est aussi important de noter que malgré tout le formalisme (parfois lourd) mis en place autour des évaluations, celles-ci se basent sur des critères souvent difficiles à suivre ou à anticiper. Les définitions des critères selon lesquels nous sommes toutes et tous évalué-es sont, au mieux, vagues, et les prérequis aux passages de niveau d’ancienneté (junior à confirmé, confirmé à senior, senior à expert, expert à senior expert) ou de changement de poste ne sont jamais explicités. Ce flou ne fait qu’encourager un arbitraire qui ne sert personne, à part une direction souhaitant pouvoir se défaire de toute demande motivée en invoquant ces critères pour justifier sa décision.


Ces constats nous amènent à formuler les revendications suivantes :

  • Les évaluations individuelles ne doivent pas être intrinsèquement liées à la rémunération. La rémunération est contrainte par un budget, qui n’est pas extensible à l’infini, alors que tout une équipe (ou toute une entité) peut très bien avoir atteint ou même dépassé les attentes.
    • En conséquence, nous revendiquons que les évaluations ne soient plus soumises à des quotas.
    • L’évaluation doit être menée uniquement par la personne directement responsable de l’évalué-e. Il n’est pas normal que certaines ou certains voient leur évaluation menée par une hiérarchie distante, ou que les services RH aient une influence surdimensionnée sur certaines évaluations. Là encore, décorréler rémunération et évaluations permettrait de rendre à ces dernières leur vocation originale d’outil de progression, utile à la fois à la personne évaluée, et aux équipes qui l’emploient.
    • Enfin, une meilleure évaluation (car recentrée sur son but premier) doit être accompagnée d’offres de formation appropriées, afin de permettre à toutes et à tous d’entretenir nos compétences sans avoir à changer de métier.
  • Les conditions de passages de niveau de séniorité doivent être explicitées. La reconnaissance professionnelle est importante dans notre industrie, et il est inacceptable que quiconque puisse subir une injustice malgré de bonnes évaluations.
    • En particulier, il s’agit de préciser non seulement les compétences attendues à tel ou tel niveau de séniorité, mais aussi les moyens pour une personne travaillent chez Ubisoft de faire reconnaître ces compétences.
    • Il est certain qu’une fois ces critères publiés, un certain nombre de personnes constateront qu’elles ont de fait des compétences supérieures à leur poste actuel. Il sera nécessaire de rectifier ces incohérences en accordant les promotions qui s’imposent.
  • L’équité de rémunération pour toutes et tous. Cela passe par les points suivants :
    • Bien évidemment, la fin de toute différence de salaire sur un critère discriminatoire comme interdit par la loi. En particulier, personne ne devrait subir un revenu plus bas du fait de son appartenance à un groupe marginalisé.
    • La transparence sur la rémunération est vitale. Aujourd’hui, la position de la direction est des plus ambigües : pas de grille de salaires, mais des fourchettes pré-établies ; un appel à négocier en individuel, mais une gestion extrêmement opaque et le plus souvent rigide des demandes légitimes qui lui sont remontées. Qui d’autre qu’elle peut bien bénéficier d’une telle chape de plomb ?
  • Un processus impartial doit être mis en place en cas de contestation. Ceci afin de garantir l’équité des rémunérations proposées par le groupe Ubisoft aux personnes qui lui permettent de réaliser des bénéfices records, et de mettre fin aux évaluations arbitraires et parfois discriminatoires.
    • Une réévaluation par une tierce partie neutre pourra être effectuée, en s’appuyant sur des critères devenus plus transparents et une grille salariale explicite.
    • Pas d’implication de la direction et des RHs locales.

Qu’il y ait encore des personnes en situation de précarité économique parmi les équipes travaillant pour Ubisoft, une entreprise qui ne cesse d’afficher son insolente santé financière, démontre bien à quel point ce sujet est vital. Ce communiqué vise à établir ces lignes directrices qui guideront nos actions de terrain dans le futur.

En attendant que la direction se positionne, nous invitons toute personne travaillant au sein du groupe Ubisoft à nous contacter si vous souhaitez vous joindre à nos efforts ou échanger avec nous. Nous invitons notamment les salarié·es ayant constaté des incohérences ou des discriminations à leur encontre lors des dernières évaluations à se rapprocher de leurs responsables syndicaux ou à écrire directement à . Le STJV est prêt à défendre toute personne de l’industrie qui en a besoin, syndiquée ou non. Ne restez pas seul·es !

Mobilisation nationale contre l’extrême-droite – Samedi 12 Juin 2021

Celles et ceux qui suivent l’actualité politique de manière assidue depuis quelques années ont pu constater la droitisation de plus en plus extrême de la politique française. Depuis plusieurs années, les lois « anti-terroristes » s’accumulent, surfant sur la peur (légitime) que des attentats ont pu causer pour diminuer de plus en plus les droits de toutes et tous, s’attaquer à la justice et préparer le terrain pour un régime autoritaire. Cette pente dangereuse a connu une accélération récente, avec un gouvernement qui reprend les éléments de langages et idées de l’extrême-droite, nomme des ministres proches d’organisations royalistes et antisémites, et accusés de viol par plusieurs femmes, et répond aux problèmes sociaux de la seule manière qui s’accorde avec sa politique en faveur des riches : la force.

En conséquence, les divers organisations fascistes sortent de l’ombre et se sentent pousser des ailes, multipliant les attaques violentes envers des militant‧es et organisations de gauche, et envers les institutions démocratiques (invasion de l’assemblée régionale d’Occitanie, menaces envers des élu‧es). Les « syndicats » corporatistes de police multiplient les actions, très souvent illégales, pour demander explicitement que la constitution et la déclaration des droits de l’homme soient abolies afin d’assouvir leur soif de violence fasciste. Des militaires, soutenus par des politiques et des journaux, appellent à un coup d’état violent ciblant explicitement la gauche et les musulmans. Et tout cela sans que toutes ces personnes ne subissent de sanction, sans réaction de la présidence française, et au contraire avec le soutien de personnalités politiques et médiatiques.

La place du jeu vidéo dans la radicalisation à droite de la société n’est pas négligeable. Le jeu vidéo, un des principaux médias actuels, est notamment gangrené depuis le début de son existence par ses liens avec les armées et les marchands d’armes. Ces organisation le financent et l’utilisent pour leur propagande nationaliste, « vendre » leurs guerres impérialistes et normaliser leur violence. Si les représentations dans les jeux vidéos et leurs messages évoluent, trop lentement et trop timidement, les propos des jeux à succès posent quasi systématiquement problème et participent activement aux discriminations et à l’ambiance fascisante.

La subordination volontaire, par intérêt capitaliste, d’une partie de l’industrie à une frange de l’extrême droite en ligne issue notamment du gamergate et à des intérêts gouvernementaux autoritaires pèse encore énormément sur l’industrie. En tant que travailleurs et travailleuses du jeu vidéo notre rôle dans la montée de l’extrême-droite n’est malheureusement pas anodin, mais nous pouvons nous mobiliser pour lutter contre et à terme faire pencher la balance. Cela se fera notamment en reprenant le pouvoir sur les productions, et donc par plus de démocratie en entreprise.

Ce climat inquiétant dans lequel nous vivons doit nous pousser à rester actif‧ves, uni‧es, et à nous mobiliser avec les autres organisations de gauche pour faire barrage à l’extrême-droite. Regrettant que les organisations antiracistes, qui luttent contre les violences policières et l’islamophobie depuis des décennies, n’y aient pas été associés dès le départ et déplorant le fait qu’un syndicat de policiers ait pu le signer, le STJV rejoint néanmoins, devant l’urgence de la situation, l’appel pour les libertés et contre les idées d’extrême-droite co-signé par un grand nombre d’organisations politiques, syndicales et médiatiques. Nous invitons toutes et tous à se mobiliser dans la rue le 12 Juin pour les manifestations qui auront lieu partout en France.

Les retours forcés au bureau sont (encore et toujours) irresponsables

De la même manière que lors du déconfinement en Juin dernier, ou qu’à la rentrée de Septembre, nous voyons se profiler une situation de retour au travail sur place désordonnée causée, entre autres, par des directives gouvernementales floues.

Or, si l’épidémie de coronavirus semble désormais en recul relativement stable, le virus se transmet toujours et des personnes en meurent encore chaque jour. Pire, si on regarde du côté de l’Angleterre, qui a connu une baisse du nombre de cas similaire à la France récemment, on voit que de récents variants font actuellement remonter la courbe de cas et inquiètent très fortement les épidémiologistes. La leçon à retenir de 2020 est bien qu’il faut éviter de se précipiter !

C’est pourtant ce que nous constatons dans plusieurs entreprises de jeu vidéo. Qu’une partie du patronat français s’empresse à faire revenir les employé·es dans les locaux est indigne. Cela révèle au mieux une lecture hâtive et simpliste de la situation, et au pire la recherche infâme de profits pourtant hypothétiques et d’une volonté de pouvoir sur les salarié‧es. Dans tous les cas cela met en danger la santé non seulement des travailleuses et travailleurs du jeu vidéo, mais aussi de la population en général.

Il est naturel et compréhensible que beaucoup parmi nous souhaitent désormais un retour à la normale. Après plus d’un an de confinements, de couvre-feu et de restrictions diverses et variées, qui n’aspire pas à relâcher la pression ? Mais si le but est réellement de contrôler cette épidémie, de prévenir le plus de morts possibles et d’enfin permettre à nos soignantes et soignants de respirer, alors il serait irresponsable de ne pas étaler dans le temps le retour à nos vies « d’avant ».

Le STJV invite donc fermement toutes les entreprises du jeu vidéo à :

  • Laisser encore au cours de l’été, puis en fonction de la situation sanitaire, le choix, sans demander de justification, aux employés et employées entre présentiel, télétravail, et toute solution hybride ;
  • Continuer à appliquer toutes les mesures sanitaires, en particulier les jauges maximales de présence, afin de limiter les risques de contagion au bureau ;
  • Permettre aux employé·es d’aller se faire vacciner sur les horaires de travail, sans pénalité et donc sans les forcer à utiliser des congés payés ou sans-solde, afin de lever le plus d’obstacles possibles à cette vaccination.

Le STJV restera attentif à la suite des événements et surveillera les attitudes des entreprises du secteur. Nous restons toujours à la disposition de celles et ceux qui auraient besoin de notre aide, ou auraient des questions sur leur situation ou celle de leur entreprise. N’hésitez jamais à nous contacter à

Vendredi 23 Avril 2021 : Appel à la grève contre la réforme de l’assurance chômage

Depuis le début de la crise du Covid-19, les chiffres de la pauvreté sont en hausse à travers le monde et la France est loin d’être épargnée. Cette pandémie n’est pas seulement une crise sanitaire, elle est également une crise économique et sociale et ses effets sont destructeurs.

C’est pourtant malgré ce constat que la réforme de l’assurance chômage s’apprête à enfoncer le clou pour 1,15 million de demandeur‧ses d’emploi dès la première année selon les dernières estimations de l’Unedic. Certain‧es d’entre elleux perdront jusqu’à 260 € par mois par rapport aux règles actuelles, alors même que leur allocation initiale n’atteignait pas le seuil de pauvreté !

Un décret du 31 Mars 2021 détaille la mise en place des derniers volets de la réforme. Dès le 1er Juillet 2021, les montants des allocations des travailleur‧ses ayant perdu leurs emplois seront réduis de 20% en moyenne et ce taux pourrait monter jusqu’à 45% dans certains cas. Ensuite, à partir du 1er Octobre, la durée de travail nécessaire pour ouvrir des droits sera allongée à 6 mois sur les 24 derniers mois au lieu de 4 mois sur les 28 derniers mois.

Ce changement de règles permettrait à l’État d’économiser 2,3 milliards d’euros par an sur le dos des plus précaires, alors qu’en seulement 9 mois les milliardaires français ont retrouvé leur niveau de richesse d’avant la pandémie selon un rapport d’Oxfam.

Cette réforme a été refusée de manière partielle par le conseil d’état et de manière unanime par les organisations syndicales en raison des injustices flagrantes qu’elle va créer, du contexte de crise sanitaire et de son impact économique. Elle est pourtant poussée une nouvelle fois par un gouvernement inflexible et sans grands changements par rapport à sa première rédaction. Ce nouveau passage en force témoigne une fois de plus du peu de considération qu’a ce gouvernement envers les partenaires sociaux et les personnes précaires.

Les conséquences de la crise économique du Covid-19 entraînent déjà la perte d’emploi pour des millions de travailleurs/ses, et ces suppressions d’emploi vont continuer. L’assurance chômage concerne tout le monde ! Dans le jeu vidéo, le recours massif aux contrats et status précaires fait passer beaucoup de travailleur‧ses par la case chômage. Cette réforme nous concerne donc particulièrement.

Le STJV appel donc à la grève le vendredi 23 avril 2021 pour demander, avec les autres organisations syndicales, l’abrogation pure et simple de cette réforme. Une mobilisation populaire massive est nécessaire pour arrêter la casse de nos droits sociaux.

Nous rappelons que cet appel couvre le champ d’action du STJV dans le secteur privé, et concerne donc toute personne employée par une société d’édition, de distribution, de service et/ou de création de jeu vidéo ou matériel pour le jeu vidéo quel que soit son poste ou son statut et quel que soit le type de production de sa société (jeux consoles, PC, mobile, serious games, expériences VR/AR, moteurs de jeu, services marketing, consoles de jeu, streaming, etc.), ainsi que tout·e·s les enseignant·e·s travaillant dans des écoles privées dans des cursus en lien avec la production vidéoludique. Pour toutes ces personnes, et puisqu’il s’agit d’un appel national à la grève, aucune démarche n’est nécessaire pour se mettre en grève : il suffit de ne pas venir travailler les jours où vous souhaitez faire grève.

LISAA : Face au suicide d’un étudiant, la direction fait le choix de la répression et de l’inaction

Il y a deux semaines, le magazine Capital publiait un article sur le suicide de Pheanith Hannuna, étudiant de la section Animation de L’Institut Supérieur d’Art Appliqué (LISAA) ayant mis fin à ses jours en Décembre suite à une campagne de harcèlement par d’autres étudiant‧es. Rapidement informé de ce tragique événement au moment des faits, le STJV avait assisté des étudiant·es et professeur·es de la section Game (jeu vidéo), les sections Game et Animation étant regroupées sous la même direction. Nous n’avions à ce moment pas souhaité communiquer publiquement sur ce sujet, les événements qui ont suivi et la réaction de l’école, par respect pour le deuil de sa famille. Cependant, maintenant que ce suicide a été rendu public, nous aimerions apporter un peu plus d’informations sur, et dénoncer, le comportement et les agissements de l’école qui l’ont suivi.

Nous tenons avant toute chose à présenter nos plus sincères condoléances à la famille de Pheanith Hannuna, suite à cette perte irremplaçable. Chacun·e d’entre-nous a appris cela avec une vive émotion.

Déresponsabilisation face à une situation grave

Nous avions déjà appris, dans le contexte instable actuel de pandémie, confinements, couvre-feux, etc., qu’une partie des élèves de LISAA dans les sections Game et Animation souffre mentalement, certain‧es ayant abandonné leurs études dans l’année écoulée, et que l’école gère très mal les cours en distanciel. Les professeur‧es n’ont en effet pas reçu d’instructions sur l’adaptation des cours, et la direction de l’école ne prend pas suffisamment en compte la difficulté du distanciel pour les élèves.

Nous avons été à nouveau choqué·es par la communication et la réaction de la direction de l’école suite au passage à l’acte de Pheanith. Celle-ci a été minimale, sans aucun tact, violente envers les personnes cherchant à améliorer la situation des étudiant‧es, et balayant toute responsabilité éventuelle de l’école.

Ce suicide a été annoncé à l’équipe pédagogique par un communiqué, dans lequel la direction des sections Game et Animation explique qu’il faut « accepter » de ne pas pouvoir connaître et comprendre les raisons qui poussent quelqu’un à mettre fin à ses jours. Elle conclut son communiqué par cette formule odieuse et culpabilisante au sujet des élèves fragilisé‧es : « nous leur tendons la main mais à eux de la prendre ».

Cette déresponsabilisation est d’autant plus intolérable que la direction semble avoir été au courant du harcèlement que subissait cet étudiant depuis son entrée à l’école, comme cela a été rapporté par des personnes interviewées par Capital et par plusieurs personnes qui nous l’ont confié directement. LISAA n’a pas pris de mesures pour protéger Pheanith de ses harceleurs·ses, et a au contraire abondé dans leur sens en le culpabilisant. L’école aurait-elle tenté de cacher cette situation plutôt que d’intervenir pour la régler ?

Les étudiant‧es avec qui nous avons pu échanger se plaignent d’une communication erratique et sans empathie de l’école. La mise en place d’une cellule psychologique par l’école a été annoncée avant toute communication sur le suicide de l’étudiant, cette information circulant donc d’abord de manière informelle entre étudiant·es. Par la suite, les réunions des étudiant·es avec différent‧es membres de la direction ont été décrites comme « très froides » et même « surréalistes ». La situation actuelle des étudiant·es, alarmante, et ce dernier événement tragique étaient, jusqu’à ce que ce suicide soit rendu public par voie de presse, passés sous silence en dehors du campus et des sections concernées, des professeur·es et étudiant·es n’étaient ainsi pas au courant de ce qu’il se passe dans leur école. Les étudiant·es ne se sentent pas écouté·es et n’ont plus confiance dans la direction de l’école.

Les établissements privés d’enseignement supérieur ont la responsabilité d’assurer le bien-être de leurs employé·es et étudiant·es. LISAA ne semble pas en prendre la mesure. Il aura fallu la publicisation, plusieurs mois après, de cet événement pour que l’école, dans un nouveau communiqué, propose enfin à ses étudiant·es d’aller plus loin et de discuter directement. Néanmoins, la direction prétend dans ce même communiqué que l’enquête en cours l’empêcherait de s’exprimer, et précise que le rythme de cours, les évaluations et les exigences qui vont avec ne changeront pas malgré sa reconnaissance des difficultés que la période actuelle impose aux étudiant·es.

L’école, dès le mois de Décembre mais encore maintenant, semble incapable de répondre aux besoins des étudiant·es et, au contraire, s’oppose activement aux personnes cherchant des solutions permettant d’améliorer la vie étudiante.

Licenciement abusif et atmosphère malsaine

En réaction à la détresse des étudiant‧es, et poussé à l’action par le suicide de l’un d’entre elleux, un·e professeur·e de la section Game a rapidement contacté en privé le corps enseignant de sa section pour créer un canal de discussion à ce sujet. Son but était de coordonner les professeur‧es pour discuter de la conduite à avoir face à cet événement, interpeller la direction pour demander des précisions et mesures claires sur l’accompagnement des élèves, mais aussi améliorer la pédagogie afin d’alléger la charge de travail des étudiant·es et de réduire la pression qu’iels subissent, d’autant plus dangereuse en période de confinement et d’isolement social.

Mise au courant de cette communication, la direction de la section Animation et Game de LISAA a réagi en mettant à pied cette personne, avant de lea licencier pour faute grave, prétextant qu’iel a cherché à semer le trouble au sein de l’école par ces échanges (privés), motif fallacieux que nous contestons vivement.

Au mépris de la loi, lea professeur·e a été remplacé‧e avant notification de son licenciement, comme en attestent des emails envoyés aux étudiant·es annonçant l’arrivée d’une nouvelle personne pour reprendre ses cours, et une offre d’emploi partagée par des personnes de l’école avec d’autres travailleur·ses du jeu vidéo.

De plus, l’école essaie de cacher ce licenciement en omettant de mentionner le rôle joué par la direction dans le changement de professeur·e, cherchant à couvrir ses traces dans la gestion des événements. Quand elle n’a pas le choix, elle prétend que lea professeur·e concerné·e est parti·e pour motif personnel, ce qui est bien évidemment faux.

Ce licenciement abusif n’est rien d’autre qu’un licenciement bâillon. Il vise à tuer toute autonomie des professeur‧es et à les empêcher de communiquer entre elleux, y compris en privé. Ce n’est pas un cas isolé, puisqu’il est possible d’identifier un schéma répété à partir des informations qui nous ont été rapportées sur la gestion de la section Game de LISAA. Des professeur·es ont déjà été poussé·es à quitter l’école, par divers procédés, après avoir exprimé un avis sur sa pédagogie ou remonté les doléances d’étudiant·es à la direction.

Ce dernier licenciement a eu pour conséquence l’annulation de 3 semaines de cours après que lea professeur·e ait été mis·e à pied. Cela a causé une forte incompréhension chez les étudiant·es qui appréciaient la qualité pédagogique, la disponibilité et la capacité d’écoute de ce·tte professeur·e. Les élèves ont dû subir ce vide pédagogique et le changement d’un·e de leur professeur‧es en cours d’année, sans explication par la direction et à un moment très chargé émotionnellement, en plus des incertitudes déjà causées par la période.

Il semble donc que des personnes dans la direction de l’école fassent passer leur ego et leur volonté de pouvoir avant la loi, la qualité de l’enseignement mais aussi, et bien plus grave, avant la vie et le bien être des étudiant·es, et créent ce qui nous a été décrit comme une atmosphère délétère, un climat de peur et de méfiance, pesant aussi bien sur le corps professoral que sur les étudiant·es. En effet les cas de favoritisme (ou son inverse) ne semblent pas rares, et peuvent avoir des conséquences très importantes sur le déroulement des études, allant jusqu’à l’abandon de certain·es élèves.

Un tel climat et des considérations marketing sur l’image de l’école n’ont pu que peser dans les prises de décision qui ont poussé l’école à ignorer le harcèlement subi par Pheanith, et les plaintes de sa famille. Il explique comment ce harcèlement a pu continuer en toute impunité sans que des étudiant·es et professeur‧es sortent du rang pour le faire cesser.

Toutes les personnes avec qui nous avons pu discuter, et la totalité des témoignages qui nous sont parvenus, expriment la crainte d’une « chasse aux sorcières » organisée par la direction de l’école après que des informations sur son fonctionnement interne soient rendues publiques, venant corroborer l’idée d’une atmosphère générale malsaine. Cette peur de la répression – calquée directement de l’industrie sur les études – est inacceptable et le STJV sera particulièrement attentif à la suite des événements.

En conclusion

De trop nombreuses écoles considèrent que ce qui se passe en dehors des cours et le contexte général de vie des étudiant·es ne les concerne que quand cela permet d’améliorer leur image, et les exemples de directions choisissant d’ignorer complètement les échanges sur les réseaux sociaux entre élèves sous prétexte que cela se passerait « en dehors de l’école » sont beaucoup trop nombreux. Ce genre d’attitude qui nie la responsabilité qu’ont les écoles envers leurs étudiant·es conduit à des abandons d’études, des troubles psychiques et, comme ici, pousse certain·es d’entre elleux au suicide.

Le Syndicat des Travailleurs et Travailleuses du Jeu Vidéo demande à la direction de LISAA de prendre la mesure de la gravité de la situation et d’agir pour les élèves qui y étudient, et non contre elleux. Le STJV reste bien entendu disponible pour soutenir et aider les étudiant‧es et professeur‧es affecté‧es, qui peuvent nous contacter par mail à ou par tout autre moyen.

Nous dénonçons un licenciement illégal, qui advient en période de pandémie où la précarité explose et durant laquelle il est encore plus difficile de trouver un emploi. Nous sommes particulièrement inquiet de l’incertitude que ce licenciement, le contexte émotionnel à LISAA, et le changement de professeur‧e en court d’année va amener pour les étudiant‧es.